Un combat relégué au second plan
La lutte contre les discriminations, il y a de cela deux décennies, était enfin entrée dans l’agenda des politiques publiques, sous l’influence des directives de l’Union européenne dans les années 2000. La création de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) en 2004, l’ancêtre du Défenseur des droits, en est un exemple. Dans la société, elle suscitait un véritable élan de mobilisation. Pourtant, aujourd’hui, elle semble reléguée aux marges du débat médiatique et politique en France. Cette question, autrefois si prégnante dans les années 90 et au début des années 2000, semble avoir perdu de son écho, reléguant dans l’ombre les enjeux cruciaux qu’elle soulevait.
Les voix des minorités qui portent la lutte pour l’égalité des droits sont souvent étouffées, disqualifiées sous le prétexte fallacieux de ne pas être « vraiment français ». Tandis que ceux qui défendent cette cause sont affublés d’étiquettes comme « wokistes » ou « islamo-gauchistes », les vrais enjeux se perdent dans les méandres d’une rhétorique stérile. Pire encore, la lutte contre les discriminations est aujourd’hui perçue comme un problème en soi, délaissant le véritable fléau que constitue la parole raciste, désormais banalisée, notamment par les discours publics et médiatiques.
Un danger pour la démocratie
Or, il est crucial de comprendre que les discriminations sapent les fondements mêmes de la démocratie, bâtie sur le principe d’égalité des droits politiques, civiques et sociaux. En marginalisant certaines catégories de la société, elles creusent un fossé profond dans le tissu social, fragilisant les liens qui nous unissent en tant que citoyens.
Ces discriminations, telles que les violences policières, le racisme dans les services publics et les campagnes de harcèlement comme celle ayant ciblé Aya Nakamura aux JO, contribuent également à éloigner les personnes discriminées de la participation démocratique, les condamnant à un isolement citoyen préjudiciable à l’ensemble de la société. Elles alimentent les tensions sociales, accroissant les risques de fracture au sein de la communauté nationale. Il est grand temps de reconnaître que le véritable problème n’est pas le multiculturalisme, mais bien le monoculturalisme, une représentation fantasmée d’une société française homogène, qui n’a jamais existé que dans les récits nostalgiques, tels que ceux d’Éric Zemmour qui déforment l’histoire.
Un tabou entretenu par le discours nativiste
Si la lutte contre les discriminations semble aujourd’hui être un sujet tabou, c’est en grande partie parce que le discours nativiste l’a complètement délégitimée en tant que question de justice sociale. Il est dès lors impératif de réaffirmer notre engagement dans cette lutte, en donnant une visibilité accrue à la mobilisation déjà existante au sein de la société civile, des associations, des syndicats et des entreprises.
Le rôle crucial de l’Idem
Le rôle de l’Idem est multiple et essentiel. Tout d’abord, nous devons œuvrer à sensibiliser les décideurs politiques et économiques sur le coût économique, sanitaire et social des discriminations. En montrant que lutter contre celles-ci est non seulement une question de justice, mais également un investissement pour une société plus démocratique, nous espérons susciter un véritable changement.
Parallèlement, il est primordial de continuer à mener une analyse scientifique rigoureuse des réalités discriminatoires, tout en sensibilisant les acteurs institutionnels et économiques à ces enjeux cruciaux. Enfin, nous devons également ouvrir le débat au niveau international, raison pour laquelle l’Idem s’est doté d’un conseil scientifique international, car les discriminations sont un phénomène mondial qui nécessite une réponse collective et coordonnée.
Un combat pour une société plus juste
La lutte contre les discriminations est l’affaire de tous. En tant qu’institut, nous sommes déterminés à jouer notre rôle dans cette bataille pour une société plus juste, égalitaire et démocratique. Il est temps de redonner voix à ceux que la société a trop longtemps relégués au silence, et de faire de la lutte contre les discriminations une priorité absolue de notre agenda politique et social.