Emmanuel Macron a choisi l’abîme, laissant la société face au péril nativiste – Revue du 15 juin 2024

Lio Ando-Bourguet et Perin Emel Yavuz

50 minutes

Nous vivons une séquence politique historique mais dans le fond, sans surprise : suite à la défaite de son parti aux dernières élections européennes, Emmanuel Macron gouverne seul, en accélérant par la dissolution de l’Assemblée nationale la crise politique, envisagée par lui comme la seule solution à ce revers massif dans les urnes. Pourtant élu à deux reprises comme un rempart à l’extrême-droite, le risque semble totalement assumé de faire accéder le Rassemblement national au pouvoir dans trois semaines. Il invoque le républicanisme pour continuer de renvoyer l’extrême-droite et le Front populaire dos à dos, mais le voilà prêt à faire du RN le premier groupe à l’Assemblée nationale.

La semaine le confirme : les idées du RN se sont banalisées au cours des années Macron, relayées à longueur de journée par l’audiovisuel — au point que la droite traditionnelle se dissout pour s’allier en partie au parti Le Pen, et que des grands patrons, des hauts fonctionnaires et la radio publique acceptent et préparent son arrivée de l’assemblée jusqu’aux manettes du gouvernement. 

L’extrême-droite est-elle désormais la boussole politique ? Il semblerait que oui dans le sens où les lignes politiques s’éclaircissent plus que jamais entre celles et ceux qui s’opposent au néolibéralisme fasciste coûte que coûte, et les autres qui s’en accommodent bien. 

Il y a en effet un espoir : la surprise vient de la gauche qui est au rendez-vous dans la résistance à l’extrême-droite, avec un programme qui s’oppose point par point au détricotage de la démocratie sociale française. Il lui faut maintenant adopter le bon logiciel face à l’extrême-droite et ses alliés objectifs (celles et ceux qui ont déclaré lors des derniers jours préférer voter RN que Front populaire). L’électorat d’extrême-droite se mobilise moins sur une entente raciste (sans minimiser pour autant son existence, sa banalisation, et son danger) que sur des questions socio-économiques, de sentiment du déclassement, et de défiance envers les institutions, politiques notamment. La gauche porte une grande responsabilité : réussir à convaincre cet électorat-là que l’extrême-droite n’est pas la solution mais une énième manifestation du problème. 

Dans cet effort, les questions identitaires restent importantes — non pas pour chercher à combattre l’extrême-droite sur son fief, mais pour deux autres raisons. D’abord, pour correctement faire face à la colère légitime (conséquence des politiques néolibérales) qui se tourne vers les discours antidémocratiques d’exclusion. Offrir une alternative à la manipulation identitaire qui rend dignité et espoir. Ensuite, pour adresser les incertitudes et faiblesses sur ces sujets dans ses propres rangs, et réussir à établir des principes et termes clairs contre ceux imposés jusque dans les médias. Aujourd’hui, contrairement à beaucoup de perceptions, le vrai clivage n’est pas entre les « progressistes » (parfois dits « libéraux ») et les « identitaires ».

En effet, en analysant les programmes de Giorgia Meloni et de Marine Le Pen, le politologue Olivier Roy note que « [l]e populisme d’aujourd’hui est libéral sur les mœurs, mais il fait de ce libéralisme une marque identitaire contre les immigrés et les musulmans. Le libéralisme d’aujourd’hui n’est plus universaliste. » Autrement dit, beaucoup, y compris dans la gauche, promeuvent l’islamophobie et la xénophobie au nom du progressisme. Le racisme a de nombreux visages et parle désormais de différences irréconciliables de « cultures », essentialisées, figées, regardant vers un passé imaginé. Le vrai clivage, selon le politologue et directeur de l’Institut pour la démocratie Christophe Bertossi, est « entre ceux pour qui “l’islam n’est pas compatible avec la république” et ceux pour qui “l’islamophobie n’est pas compatible avec la démocratie” ».

Résultats de l’élection européenne

Une Europe conservatrice, identitaire et nativiste

En France, ce sont 37 % des électeur·ices mobilisé·es qui ont voté pour l’extrême-droite aux élections européennes. Une nette progression depuis les dernières élections qui montre un basculement des voix pour le parti présidentiel vers celui de Marine Le Pen. Ces deux cartes du Monde montrent en effet l’évolution de la répartition des partis arrivés en tête, commune par commune, en 2019 (voir la carte) et en 2024 (voir la carte) respectivement.

À gauche, carte des résultats des élections européennes en 2019. À droite, carte des résultats des élections européennes 2024. (Source Le monde)

En 2019, le Rassemblement National avait déjà atteint son record de voix et était arrivé en tête avec 23,34 % des suffrages exprimés, contre 22,42 % pour La République en Marche / MoDem, arrivés second. Le choc des résultats des élections de 2024 provient de l’avance de la liste du RN sur toutes les autres (31,4 % des suffrages exprimés), ayant recueilli plus de deux fois plus de votes que Renaissance (ex LREM) (14,6 %). En comptant également les votes pour la liste de Reconquête ! (le parti d’Eric Zemmour), cela veut dire que 9 119 063 personnes en France ont voté pour l’extrême-droite, lui permettant d’obtenir 35 sièges sur les 81 sièges attribués à la France au Parlement européen. Une autre version de la carte des résultats de 2024, réalisée par le data-journaliste Karim Douïeb, prend compte du poids démographique des communes et permettrait une représentation plus nuancée du vote pour le RN dans le pays.

Cependant, les deux cartes révèlent in fine la même chose : le vote RN s’est drastiquement répandu dans les territoires ruraux, parmi lesquels des communes ayant auparavant favorisé LREM ont cette fois davantage opté pour le RN.

Plus à gauche, l’élection a été marquée par un net gain de voix pour le Parti socialiste-Place Publique (13,83 %) aux dépens de Renaissance et d’Europe Ecologie les Verts (5,50 %), qui avait recueilli 13,48 % en 2019. La France Insoumise progresse également, passant de 6,31 % des votes à 9,89 %.

La participation aux élections s’est élevée à 51, 5 %, en petite hausse par rapport à 2019.

Qu’en est-il à l’échelle européenne ? Les résultats en France s’inscrivent dans une dynamique plus large de laquelle émerge une majorité claire au Parlement européen désormais composée de la droite et de l’extrême-droite (57 % des sièges). C’est surtout l’extrême-droite qui progresse, passant de 15,3 % à 25,7 % des sièges. Ce découpage entre droite et extrême-droite est néanmoins à relativiser au regard de l’alignement de leurs positions quant à la gestion des migrations, leur non-respect du droit d’asile et d’autres droits humains, et leur partage d’une vision identitaire et nativiste pour l’Europe. Les centristes et libéraux (auxquels appartient Renaissance) sont passés de 14,4 % à 11,1 % des sièges au Parlement européen. En passant de 37,3 % des sièges en 2019 à 31,5 % en 2024, la représentation de toute la gauche confondue ne diminue finalement pas tant.

Source : Le Monde

À gauche, ce cartogramme du Monde montre les tendances des votes répartis par pays (voir sur le site du Monde), tandis qu’, à droite, cet autre représente en détail le vote d’extrême-droite (voir sur le site du Monde), qui stagne ou progresse partout sauf en Hongrie et en Italie, deux pays dont les gouvernements sont d’extrême-droite (à noter que leur score reste cependant très élevé et que dans ce dernier cas, Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni effectue un score historique qui démontre plutôt une recomposition de l’extrême-droite dans le pays). En Allemagne, pays membre émettant le plus d’eurodéputé·es (96 sièges sur 720), le parti d’extrême-droite Alternative pour l’Allemagne (AFD) a réalisé son meilleur score depuis sa création et est arrivé en deuxième place (16 % des voix et 15 sièges). C’est en France que la progression de l’extrême-droite reste une des plus flagrantes.

William Audureau, Adel Miliani, Manon Romain, Assma Maad et Romain Geoffroy, Européennes 2024 : les pays où l’extrême droite l’emporte, ceux où elle plafonne, Le Monde, 10 juin 2024

Maxime Ferrer, Manon Romain et Pierre Breteau, Résultats européennes 2024 : les sièges, pays par pays, et la composition du futur Parlement, Le Monde, 9 juin 2024

Le vote d’extrême-droite

Un succès à nuancer. Jordan Bardella a mené le Rassemblement national (RN) à son meilleur score aux élections européennes, en augmentation de 8 points par rapport à 2019. Cependant, ce succès doit être nuancé, car il ne signifie pas une victoire certaine aux législatives : bien que le RN devance la majorité au pouvoir par un écart significatif de près de 17 points, il continue de diviser profondément l’électorat français, dont une partie importante ne se mobilise pas dans les urnes, ou alors utilise l’occasion comme un vote de sanction du Président de la République plutôt que comme un vote d’adhésion aux idées d’extrême-droite (selon Ipsos, 68 % de son électorat indique être motivé par un vote de sanction en mai à la veille du scrutin, contre 38 % en moyenne). Cette récente performance consacre le succès de la stratégie de normalisation prônée par Marine Le Pen depuis 2011 pour paraître plus modérée et même progresser parmi des catégories habituellement réticentes à son égard (juifs, femmes, LGBTQI+) — pendant que la France insoumise est plus diabolisée que jamais. S’ajoute à cela “l’effet Bardella” qui semble attirer davantage les 60-70 ans et les classes moyennes et supérieures. Le score du RN tient également à la stratégie de Macron de réduire le débat politique à un affrontement de personnalités clés autour des idées du RN. Mais à mesure que son électorat s’élargit, il devient de plus en plus difficile pour le parti de séduire tout le monde, masquer les contradictions de son programme économique, et modérer ses positions autoritaires et discriminatoires qui peuvent encore largement faire effet de repoussoir. Malgré le succès électoral, le RN fait face à des défis significatifs pour consolider sa position et élargir son influence dans le paysage politique français à long terme.

S’interrogeant sur l’importance de la ruralité dans le vote d’extrême-droite, l’économiste Olivier Bouba-Olga démontre que la différence de score entre les milieux ruraux et urbains s’explique non pas par les caractères justement ruraux ou urbains des communes de vote, mais plutôt par la composition sociale des électeur·ices qui y résident. Autrement dit, qu’une personne vive en milieu rural ou urbain (c’est-à-dire quelle que soit sa localisation), ce qui compte pour expliquer son vote est plutôt son niveau de diplôme et sa tranche d’âge. 

Olivier Bouba-Olga, Le vote Bardella : un vote rural ?, Blog Université de Poitiers, 13 juin 2024

Migration du vote RN vers les villes. Le démographe Hervé Le Bras rappelle que « dans les sondages on voit que c’est la classe d’âge 30-55 ans qui vote le plus pour le RN. » Donc, la classe d’âge toujours active qui a passé la jeunesse et qui souffre particulièrement du manque de possibilités d’ascension sociale [intégrer lien]. Cette analyse est confirmée par d’autres chercheurs dont le politologue Yves Sintomer, qui pointe notamment l’arrivée en tête du RN dans beaucoup de petites et moyennes villes ou alors en Seine-et-Marne, à la périphérie de Paris. Il estime que le niveau de diplôme y est pour beaucoup. Selon le sociologue Benoît Coquard, « [l]e haut des catégories populaires et aussi les artisans, les commerçants (…) disent aujourd’hui fièrement voter RN » — voter RN n’est donc désormais plus honteux, mais respectable et assumé. 

Protéger la culture démocratique contre la dédiabolisation des idées d’extrême-droite sur l’immigration. Les résultats en France s’expliquent par une dédiabolisation des idées d’extrême-droite par les partis traditionnels, notamment autour de débats associés à l’immigration. Pour le politologue Matthijs Rooduijn, « [l]a France est l’un des bastions de l’extrême droite en Europe ».  Face à cela, il appelle non seulement à critiquer l’extrême-droite mais à « protéger la culture de la démocratie libérale. » « Beaucoup de partis traditionnels ont critiqué, pour de très bonnes raisons, les mouvements d’extrême droite, leur programme et ce qu’ils représentent. Mais je pense que ce n’est plus suffisant désormais. Ce qu’il faudrait aussi faire, selon moi, c’est protéger la culture de la démocratie libérale. Les études montrent que les gens ne s’y déclarent pas particulièrement attachés, ne se définissent pas comme ça. C’est un problème. Il est essentiel de faire prendre conscience aux gens de l’importance de ce système, du contrôle démocratique du pouvoir, des droits individuels, de la liberté de la presse, de toutes ces choses qui font la culture de la démocratie libérale. Cette culture est menacée par l’extrême droite, dont les idées sont incompatibles avec ces principes, comme on le voit dans les pays où l’extrême droite est arrivée au pouvoir, en Hongrie par exemple. »

Des figures importantes de la société civile élues

Domenico Lucano, maire de Riace, et Carola Rackete, ancienne capitaine du Sea Watch 3, ont été élus eurodéputés en Italie et en Allemagne, respectivement. Lucano, connu pour son accueil des migrants, a été élu sous la bannière de l’Alliance des verts et de la gauche en Italie. Il retrouve aussi son poste de maire de Riace après des années de déboires judiciaires, ayant été acquitté de la plupart des charges en 2023. Rackete, célèbre pour son sauvetage de migrants en Méditerranée, a été élue sur la liste du parti Die Linke en Allemagne. Elle souhaite se concentrer sur les questions environnementales et climatiques au Parlement européen.

Ilaria Salis, enseignante de Monza et militante antifasciste italienne, a été élue au Parlement européen sous la bannière de l’Alliance des Verts et de la Gauche (AVS) après avoir été emprisonnée en Hongrie. Elle avait été arrêtée en février 2023 pour sa participation aux protestations contre le « Jour de l’honneur », un rassemblement néonazi. Salis a passé plus d’un an en prison, puis quelques semaines assignée à résidence à Budapest, où elle a subi des conditions de détention déplorables. Grâce à son élection, elle devrait bénéficier de l’immunité parlementaire et pouvoir quitter la Hongrie, malgré l’incertitude quant à la réaction du gouvernement de Giorgia Meloni face à une possible opposition de Viktor Orbán.

Rima Hassan, spécialiste de droit international, engagée dans la reconnaissance de l’État palestinien est également élue sous l’étiquette France insoumise. « Ma revendication, c’est l’égalité de droits du Jourdain à la mer pour les Israéliens comme les Palestiniens ». Née apatride dans un camp de réfugiés en Syrie et arrivée en France à 10 ans, son engagement lui a valu à la fois un fort soutien mais aussi des menaces. Au Parlement européen, elle défendra la nécessité des sanctions contre Israël pour faire cesser le feu et la solution à deux États.

L’effet des résultats à l’extrême-droite

« Casser du PD » pour fêter la victoire du RN. Peu après la victoire de Jordan Bardella aux élections européennes, quatre militants néofascistes du Groupe union défense (Gud), liés pour certains au Rassemblement national (RN), ont attaqué un jeune homme de 19 ans en raison de son orientation sexuelle. Aux policiers, l’un d’eux a déclaré qu’il espérait une victoire du RN pour « casser du PD autant qu’on veut ». Cherchant d’abord la collusion avec les agents, ils se sont montrés plus menaçants : « Vous verrez quand Bardella sera au pouvoir, vous verrez quand Hitler reviendra. » Ils ont été jugés et condamnés le 12 juin 2024 pour une agression homophobe à Paris. Gabriel Loustau (le fils d’Axel Loustau, proche de Marine Le Pen) et Halvard Knoepffler ont reçu six mois de prison avec sursis, tandis que Louis Germanaz et Briac Fraval de Coatparquet ont été condamnés à cinq et sept mois de prison, respectivement, avec des peines aménageables sous surveillance électronique. 

Mathieu Molard, Daphné Deschamps, Christophe-Cécil Garnier, Arthur Weil-Rabaud, Au soir de la victoire de Bardella, le Gud sort « casser du PD », Streetpress, 12 juin 2024

Matthieu Suc, Ils fêtaient la victoire de Bardella : des néonazis condamnés pour violences homophobes à Paris, Médiapart, 12 juin 2024

CNews en joie. Au soir des élections européennes, grande satisfaction sur CNews qui n’a cessé de faire le jeu du RN depuis des mois. Pascal Praud, animateur de CNews, a exprimé sa satisfaction après la victoire du RN, affirmant que « la France a dit non […] non à l’immigration incontrôlée, non à l’insécurité, non à l’islamisation et au wokisme ». En évoquant un « pays à feu et à sang », CNews a contribué à banaliser les idées d’extrême droite et a ainsi facilité le triomphe du RN avec 31,4 % des suffrages. Praud a félicité les électeurs qui, selon lui, veulent une union des droites, critiquant ceux qui s’y opposent : « Eh bien, mourez tout seul ! ». Laurence Ferrari a repris ce même récit, déclarant que « les Français ont le sentiment que le gouvernement et la gauche ne les prennent pas en compte » et expriment un « désir d’autorité ». Les médias de Bolloré, à travers des figures comme Praud et Ferrari, ont capté et dirigé la colère populaire contre la gauche et les élites, facilitant l’ascension de l’extrême droite.

Dissolution de l’Assemblée nationale

Un chef de l’État dépourvu du sens de l’État

Un coup de poker sur la vie de 60 millions de personnes. À l’annonce de la victoire de sa liste aux européennes, Jordan Bardella a immédiatement appelé à l’organisation de nouvelles élections législatives. À peine une heure après, Macron s’exécute en annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale — décision incomprise jusqu’à dans son camp (dont très peu en était mis au courant), puisque considérée par beaucoup comme un suicide politique à l’heure où l’extrême-droite est si forte. Par ailleurs, avec le premier tour programmé le 30 juin, le délai donné pour organiser ces nouvelles élections et cette campagne est très court, en plus d’avoir lieu juste avant (voire au début) des vacances d’été. Les suppositions et analyses abondent quant à la raison de cette décision inouïe, mais on s’accorde dans la presse a parler de « coup de poker » ou de « pari extrême ». Sébastien Georges s’interroge dans Le Républicain Lorrain : « pari habile, calcul politique, recomposition du paysage avec de nouvelles alliances ou des coalitions de circonstance, simili statu quo, tremblement de terre ou politique de la terre brûlée » ? Qu’importe le pari pris par Macron, il est prêt à mettre en jeu le futur de la France… dans les mains de l’extrême-droite.

Face à la gauche unie, la fureur de Macron. Quelques jours plus tard, alors que la gauche a réussi à se réunir en un « nouveau Front Populaire » en un temps record pour affronter les élections législatives, Macron donne une conférence de presse qui révèle un peu mieux le fond de son pari : miser sur l’explosion de la gauche pour s’ériger en seule alternative aux « extrêmes ». Or, celle-ci n’a pas eu lieu. Dans son discours, il n’a cessé de donner des leçons de républicanisme, mettant dos à dos le RN et la France Insoumise. L’exercice a surtout consisté à lancer une charge virulente contre cette dernière, accusée d’aller « jusqu’à justifier le pire, [d’] avoir une politique d’antisémitisme », de s’être rendue coupable de « communautarisme » et d’« antiparlementarisme ». Macron, qui veut faire exploser la gauche comme il l’a fait avec la droite, s’est également attaché à jeter l’opprobre sur le nouveau Front populaire, le qualifiant d’« alliance indécente ». 

Ellen Salvi, L’extrême dérive d’Emmanuel Macron, Mediapart, 12 juin 2024

Arrogance et impuissance. Revenant sur le résultat des élections européennes et la dissolution décidée par le chef de l’État, Olivier Roy estime que cette décision est motivée par l’arrogance et la perte du sentiment de pouvoir en raison du manque de majorité à l’Assemblée. Face à l’impréparation et au chaos que ces élections pourraient engendrer, Macron espère obtenir une majorité, mais cela paraît « complètement irréaliste, et dangereux. » Et de rappeler que Jean-Marie Le Pen avait toujours dit qu’il prendrait le pouvoir dans un moment de crise. La prise de pouvoir par le RN risque d’être suivie d’un « ralliement massif de gens de toutes catégories. » Pour Olivier Roy, Macron a « préparé l’arrivée du RN » par ses propres postures populistes et la délégitimation des institutions, rendant la montée de l’extrême droite inéluctable. « Le seul espoir, c’est le sursaut des abstentionnistes », estime-t-il. Mais Macron n’est pas le seul à blâmer : ses prédécesseurs ont eux aussi adopté des stratégies illusoires pour contrer le RN qui ont reposé sur l’adoption de ses thèmes. Enfin, analysant les programmes de Giorgia Meloni et de Marine Le Pen, Roy note que « [l]e populisme d’aujourd’hui est libéral sur les mœurs, mais il fait de ce libéralisme une marque identitaire contre les immigrés et les musulmans. Le libéralisme d’aujourd’hui n’est plus universaliste. » Si le RN arrive au pouvoir, cela entraînera un chaos marqué par des mesures symboliques ou inapplicables et des conflits internes. Le seul espoir pour Macron serait que l’incompétence du RN devienne évidente dans l’exercice du pouvoir. Cependant, l’affaiblissement de l’État et des institutions, auquel il a contribué, joue en faveur du RN.

Olivier Roy, « Macron, c’est après moi le déluge » (entretien), Le Nouvel Obs, 12 juin 2024

Une histoire qui se répète. Pour comprendre la situation politique actuelle, l’historien Yohann Chapoutot tisse un parallèle avec celle des années 1930 pour illustrer à la fois le danger de l’extrême-droite mais aussi l’espoir que suscite le nouveau Front populaire et les défis auxquels il doit faire face. Citant le philosophe Gérard Granel, Chapoutot rappelle d’abord que les conditions (exploitation humaine, dévastation environnementale, darwinisme social) qui ont mené au fascisme et au nazisme sont réunies aujourd’hui. Les crises économiques et sociales peuvent soit renforcer des mouvements autoritaires, soit catalyser des mouvements populaires, comme le Front populaire des années 1930. En 1934, face à une tentative de coup d’État d’extrême droite, une coalition entre socialistes, communistes et syndicats s’est formée, imposant l’union et menant à des victoires électorales en 1935 et 1936. Cette alliance difficile entre des factions idéologiquement opposées a permis d’éviter une dérive autoritaire en France, léguant des acquis sociaux dont nous bénéficions aujourd’hui. Néanmoins, en 1938, les socialistes d’alors ont rompu cette alliance, favorisant l’ascension de la droite. C’est le risque qui guette aujourd’hui le Nouveau Front populaire. Quant à Emmanuel Macron, par ses choix politiques, a fait de l’extrême-droite son alliée, avec laquelle il partage « le même ennemi – la gauche redistributive, qui conteste un ordre social injuste et une économie qui détruit les femmes, les hommes et le vivant. » Parier sur l’usure du pouvoir de l’extrême-droite, si elle venait y accéder est une erreur. « Nous entrons et nous n’en sortirons plus, sauf morts », écrivait Goebbels dans son journal. La répression violente et les pratiques autoritaires actuelles du macronisme préfigurent ce qui pourrait arriver sous un gouvernement RN, dopé par la normalisation des idées d’extrême droite dans les médias. « Certaines élites font le choix du pire pour leur propre intérêt et l’imposent à des peuples hypnotisés par des médias biaisés », conclut Chapoutot.  

Derrière Macron, un apprenti sorcier. La stratégie d’installer un duel entre le camp présidentiel et l’extrême droite est le fruit du travail acharné d’un ancien journaliste sportif, Bruno Roger-Petit, dont la compromission morale est restituée par une enquête du Monde. Roger-Petit a initialement rejoint Macron en 2016 après avoir écrit des articles très favorables. Nommé conseiller et porte-parole de l’Élysée, il a été rétrogradé à conseiller mémoire après une gestion désastreuse de l’affaire Benalla en 2018. Cherchant à redorer son image en trouvant des idées d’événements symboliques, il a d’abord essuyé des revers avant de trouver une stratégie qui a séduit le président : « polariser la société en deux camps », « imposer un duel entre le macronisme et l’extrême droite, balayer hors du jeu les autres partis. » Le bilan est éloquent: « en sept ans de présidence Macron, il y a eu l’interview à Valeurs actuelles, des flirts avec CNews, la reprise des mots « décivilisation » ou « ensauvagement » et enfin une loi immigration, promulguée en début d’année, flattant l’idée de préférence nationale. » Une chose à laquelle n’avait pas pensé l’apprenti sorcier : que le RN récolte la mise.

Ariane Chemin et Olivier Faye, Auprès d’Emmanuel Macron, les apprentis sorciers de la dissolution, Le Monde, 12 juin 2024 

Les réactions dans la presse internationale suite à la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron sont très mitigées : « un pari hautement risqué » (Politico), un geste « impulsif » (Daily Telegraph), « une situation tordue, typiquement française » (Caixin), « bombe nucléaire constitutionnelle » (Seneplus). Globalement, la presse internationale estime que Macron joue avec le feu. Son pari d’amener le camp de la raison et le Rassemblement national à se dévoiler est loin d’être gagné, tant l’élan de ce dernier est important. Alors que la droite se fracasse et que la gauche s’unit, la seule certitude est qu’une cohabitation s’annonce.

Le scrutin sera-t-il sincère ?

Le Conseil constitutionnel est saisi. Des spécialistes du droit constitutionnel contestent vigoureusement le décret encadrant les élections législatives anticipées, suggérant que leur recours pourrait mener à l’annulation ou au report du scrutin. Ils argumentent que les délais imposés par le président Macron compromettent la sincérité du processus électoral. Un ancien haut-fonctionnaire du ministère de l’Intérieur souligne : « La dissolution a été décidée à cinq ou six dans le bureau du Président sans spécialiste du droit électoral. Il est extrêmement problématique d’organiser des législatives dans ces conditions-là ». Le délai de vingt jours entre la dissolution (le 9 juin) et le premier tour des élections (le 30 juin) pose des défis majeurs, notamment pour les candidatures, le vote électronique, et la campagne audiovisuelle, entre autres contraintes législatives. Le Conseil constitutionnel, bien que contacté, refuse de se prononcer avant la réception officielle du recours déposé mardi après-midi, mais est tenu de l’examiner sérieusement.

Pas de rallonge pour les inscriptions sur les listes électorales. La sincérité du scrutin ne semble pas être une préoccupation pour le ministère de l’Intérieur qui a confirmé que seules les personnes inscrites sur les listes électorales avant le lundi 10 juin pourront participer aux élections législatives anticipées. « l’élection aura lieu à partir des listes électorales arrêtées à la date du décret. Cela signifie donc qu’il n’y a pas de délai supplémentaire pour s’inscrire sur les listes », a-t-il déclaré. Cette décision impacte les 7,7 millions d’électeurs mal inscrits en 2022, dont beaucoup pourraient rencontrer des difficultés pour voter dans leur bureau de vote officiel. Cette politique rigide risque de priver de nombreux électeur·ices de leur droit de vote dans des élections cruciales.

Une expérience juridique totale. La dissolution de l’Assemblée nationale marque un nouvel épisode dans cette « expérience juridique totale » que traverse la France depuis 2022, comme l’analyse Bertrand-Léo Combrade, professeur de droit public. Ce terme décrit une série d’événements mettant à l’épreuve l’interprétation de la Constitution de la Ve République. Après la perte du fait majoritaire aux législatives de 2022 et l’adoption de réformes controversées telles que celle des retraites et de la loi « immigration » par des méthodes parlementaires souvent autoritaires, la dissolution actuelle fait suite aux résultats des élections européennes. Il s’agit de la sixième dissolution sous la Ve République, rappelant celle de 1968 sous De Gaulle, qui visait à tester la majorité. Politiquement, la décision d’Emmanuel Macron est discutable, tandis que sur le plan juridique, elle pourrait marquer une nouvelle interprétation de la Constitution, alignée sur son texte. Cela soulève la question de son rôle : arbitre plutôt que leader, selon l’article 5, par opposition à un Premier ministre chargé de gouverner la nation.

Fil du professeur de droit Bertrand-Léo Combrade : une expérience juridique totale : https://x.com/leocombrade/status/1800028413278748812

Au nom du pragmatisme, certains s’apprêtent à tomber dans les bras de l’extrême droite

Pour les patrons, Marine Le Pen est moins dangereuse que Jean-Luc Mélenchon. Depuis la dissolution, les dirigeants d’entreprise français sont profondément préoccupés et incertains. Le CAC 40, habituellement proche du président, se sent désorienté et marginalisé. La décision d’anticiper les élections législatives a provoqué un choc parmi eux, principalement en raison de la montée du Rassemblement national (RN) et de ses possibles répercussions économiques et sociales. Les dirigeants redoutent une période d’instabilité politique qui pourrait compromettre les réformes nécessaires pour l’économie française, notamment fiscales, et avoir un impact négatif sur les sponsors des Jeux olympiques ainsi que sur les investisseurs étrangers séduits par le programme Choose France. L’incertitude quant au programme et aux intentions du RN renforce leur inquiétude : la position anti-immigration pourrait affecter certains secteurs, tandis que les positions sur l’environnement et le marché de l’énergie pourraient freiner l’intégration européenne. Peu de dirigeants osent s’exprimer publiquement, conscients que les électeurs sont aussi leurs clients. Seul le banquier d’affaires Matthieu Pigasse a pris position contre le RN, appelant à construire « une alternative aux extrêmes, sociale et solidaire ». Néanmoins, c’est la montée de la gauche radicale qui représente une source d’angoisse plus importante pour les dirigeants, en raison de ses propositions économiques jugées préjudiciables pour l’économie et la stabilité financière du pays. Malgré l’appel de Bruno Lemaire auprès des dirigeants d’entreprise à se positionner, les entreprises et les organisations patronales n’ont pas réussi à adopter une position commune. On est loin de 2017 où Pierre Gattaz, alors président du Medef, dénonçait le programme de Marine Le Pen, ou 2022 où son successeur, Geoffroy Roux de Bézieux, avait apporté un soutien clair à Emmanuel Macron.

Anne de Guigné, Ivan Letessier et Cécile Crouzel, Législatives : petits et grands patrons ont plus peur de Jean-Luc Mélenchon que de Marine Le Pen, Le Figaro, 11 juin 2024

Paul de Villepin, Jason Wiels et Océane Herrero, Se mouiller ou pas ? Les patrons perdent de la voix face au RN, Politico, 12 juin 2024

La haute administration envisage la gouvernance d’extrême droite. Interrogé par L’Opinion, Daniel Keller, le président de l’association des anciens de l’ENA, adopte une position pragmatique face à la montée du Rassemblement national. Keller soutient l’importance de respecter la volonté du peuple et exprime des préoccupations plus économiques et sociales que politiques quant à l’impact du RN. Il relativise la menace que le RN pourrait poser aux libertés fondamentales et aux valeurs républicaines, insistant sur la nécessité de surmonter le clivage entre les élites et le peuple. « Si le peuple veut le RN au pouvoir, les élites françaises devront l’aider, dans l’intérêt de la France », lance-t-il, appelant à la préparation de tous les corps constitués en vue d’une possible victoire du RN, tout en soulignant l’importance de l’unité et de l’ordre pour éviter le chaos.

Médias : de l’euphorie aux sueurs froides. L’annonce de la dissolution a pris de cours les journalistes et les éditorialistes. Des journalistes, tels que Benjamin Duhamel, ont cherché à exploiter des moments de tension, comme l’interview de François Ruffin. Nathalie Saint-Cricq et Ruth Elkrief ont analysé la situation avec une certaine jubilation face à la surprise politique. Le jour suivant, le 10 juin, à l’annonce de l’accord des partis de gauche, le changement de ton s’opère, à l’instar de la réaction de Ruth Elkrief qui qualifie cet accord de « très mauvaise nouvelle », avant que ne soit repris à la cantonade l’accusation diffamatoire d’antisémitisme envers la France insoumise et les « Léon Blum doit se retourner dans sa tombe ». Ce changement de ton des médias et de l’élite médiatique, qui ont contribué à la montée de l’extrême droite avec une couverture disproportionnée de Jordan Bardella, révèle la manière dont l’élite médiatique tente de préserver ses privilèges en soutenant des alliances politiques et comment cette approche pourrait finalement conduire à son propre effondrement. 

Radio France cède à l’extrême-droite. Dans ce contexte de montée du Rassemblement national et de risques pour la démocratie, les dirigeantes de Radio France, Sybile Veil, et de France Inter, Adèle Van Reeth, ont annoncé le 11 juin le licenciement de Guillaume Meurice. Ce dernier a été renvoyé pour avoir répété une blague controversée sur Netanyahu, malgré son acquittement en justice. Des figures de l’extrême droite, comme Pascal Praud et Meyer Habib, avaient vivement critiqué Radio France pour son indulgence passée envers Meurice. Cette décision est perçue comme une réponse aux pressions de l’extrême droite et apparaît comme un signe inquiétant de censure et de soumission à ses exigences.

À droite, le 21 avril 2002 est loin

Vaudeville tragi-comique chez les Républicains. Malgré un score aux européennes qui stagne par rapport à 2019, les Républicains ont été les premiers à céder à l’extrême-droite après sa victoire électorale et l’annonce de la dissolution qui force tous les partis à trouver une stratégie de survie en une courte semaine. Trois jours après, le patron des Républicains Éric Ciotti annonce une alliance avec le RN à la grande surprise de son parti qu’il n’a pas consulté. S’ensuit une séquence (à suivre) digne d’une téléréalité chez les Républicains. Alors que se joue une bataille politique au sein de LR pour déterminer la direction et la position du parti, une chose est certaine : la guerre fratricide est politicienne ou interpersonnelle, mais pas morale. À l’issue du bureau politique pour exclure Éric Ciotti (décision désormais invalidée par le tribunal), le discours de la secrétaire générale Annie Genevard contraste nettement avec celui de Jacques Chirac au lendemain des résultats des élections présidentielles en 2002. Pas de ligne rouge fondamentale tracée contre l’extrême-droite, mais plutôt une évocation du Rassemblement national comme d’un « saut dans l’inconnu ». Sans surprise, des paroles bien plus fortes sont proférées quant à la France insoumise qui incarnerait « la bienpensance dénuée du moindre courage » ou encore « la rage dénuée de la moindre crédibilité ». 

Statut de @BFMTV sur X, 12 juin 2024, https://x.com/BFMTV/status/1800904684397339002

Derrière Éric Ciotti, l’ombre de Bolloré. L’alliance d’Éric Ciotti avec l’extrême-droite n’est pas nouvelle, et a été confectionnée avec le soutien de Vincent Bolloré, milliardaire propriétaire de Cnews grâce auquel il mène une offensive politique pour la promotion d’un “Occident chrétien”. Suite à une discussion avec Bolloré, Ciotti avait déjà publiquement annoncé en 2021 qu’il voterait pour Éric Zemmour face à Emmanuel Macron aux présidentielles. En effet, l’alliance RN-LR est depuis longtemps un des souhaits de Vincent Bolloré, qui jusqu’à Ciotti (avec lequel il est proche), a peiné à trouver un soutien au sein de la droite dite traditionnelle. Le terrain y est désormais plus que favorable au regard du basculement clair du rapport de force électoral vers le RN. Le lundi 10 juin, au lendemain de la dissolution, c’est en présence de Vincent Bolloré que se sont réunis Éric Ciotti, Jordan Bardella et Marine Le Pen pour discuter de la nouvelle alliance. C’est avec Bolloré que Ciotti mène maintenant sa pétition pour soutenir cette union. 

Exit le front républicain. François-Xavier Bellamy, tête de liste des Républicains au Parlement européen (désormais élu eurodéputé), appelle au barrage contre le Front populaire en annonçant voter pour le RN en cas de face à face avec un candidat de gauche. Qu’importe la guerre actuelle au sein du parti, la responsabilité et l’implication des Républicains dans l’arrivée de l’extrême-droite au pouvoir est claire. Bellamy évoque le supposé anti-sémitisme du NPA (à noter, un parti très minoritaire dans le Front populaire) pour justifier son soutien inconditionnel au RN (fondé par d’anciens Waffen-SS), situation dont l’ironie est tragique. Sans compter le fait que CNews avait été condamné au tribunal à devoir publier un droit de réponse d’LFI après qu’elle ait été accusée d’antisémitisme à l’antenne — des propos similaires à ceux tenus par Bellamy à l’encontre du NPA. 

Une convergence naturelle. L’alliance LR-RN menée par Ciotti marque une rupture avec la doctrine stratégique historique de son parti, et acte officiellement leur convergence idéologique. Sous la dernière législature dissoute le 9 juin par Macron, LR et le RN ont souvent collaboré à l’Assemblée nationale, votant ensemble sur de nombreux amendements et propositions de loi. Par exemple, en janvier 2023, LR a soutenu une proposition de loi du RN pour le retour de l’uniforme à l’école. De plus, lors des débats sur la constitutionnalisation de l’IVG, certains députés LR se sont montrés particulièrement virulents contre l’avortement. Cette évolution s’inscrit dans une stratégie de séduction de l’électorat du RN, initiée par Nicolas Sarkozy en 2004. La droite de gouvernement s’est progressivement radicalisée, adoptant des positions identitaires sans jamais remettre en question cette orientation après les défaites électorales. La décision de Ciotti d’officialiser cette alliance, jamais tentée auparavant, marque la fin de l’autonomie stratégique de LR, qui se trouvait déjà marginalisé entre les macronistes et le RN. Pour Florent Gougou, politologue, cette alliance « est du pain bénit pour un parti, le RN, qui est en quête d’une image de respectabilité. » Il reste encore quelques voix au sein de LR, comme Emmanuelle Mignon, qui s’opposent fermement à cette alliance pour des raisons morales. 

Pauline Graulle et Youmni Kezzouf, LR et le RN : l’aboutissement d’années de convergences idéologiques, Médiapart, 12 juin 2024

La débâcle à Reconquête. La réorganisation politique issue de la dissolution surprise semble signer la fin du parti d’Eric Zemmour, pour finir d’asseoir le règne du RN à droite. Sa tête de liste aux élections européennes, Marion-Maréchal Le Pen (désormais eurodéputée avec 5,5 % des votes exprimés) l’a trahi en appelant à voter pour des candidats du RN aux élections législatives à venir, alors que Zemmour entendait mettre en place une alliance dans laquelle Reconquête présenterait certains de ses propres candidats. MM Le Pen est désormais exclue du parti de Zemmour mais déclare conserver son poste au Parlement européen. Ces recompositions soudaines jettent le doute sur la survie du parti, qui entend toujours mener campagne, seul. 

La gauche et la société civile : naissance d’un nouveau front populaire

Déferlement populaire contre l’extrême-droite. Dès le 10 juin, au lendemain du résultat des européennes et de l’annonce de la dissolution, des milliers de jeunes, indigné·es par la montée du Rassemblement national et le risque à venir, ont convergé vers la place de la République à Paris et dans de nombreuses villes. Portant des keffiehs et brandissant des pancartes, ils ont exprimé leur opposition à l’extrême droite et réclamé un front populaire uni en vue des élections législatives anticipées. Cette mobilisation a été marquée par des slogans antifascistes et des critiques virulentes contre Jordan Bardella, chef de file du RN. La diversité des manifestant·es et leur détermination ont reflété un appel à l’unité de la gauche face aux enjeux politiques actuels.

Cécile Hautefeuille et Khedidja Zerouali, Dans les rues, des milliers de jeunes « emmerdent » le Rassemblement national, Médiapart, 11 juin 2024

Mobilisation générale. Dans de nombreux secteurs, la société se mobilise contre la montée de l’extrême droite suite aux résultats historiques des élections européennes et à l’annonce par Emmanuel Macron de la dissolution de l’Assemblée nationale. Parmi elles :

  • Les syndicats dont la CFDT, la CGT, l’Unsa, la FSU et Solidaires, appellent à une mobilisation massive les 15 et 16 juin pour défendre des alternatives progressistes dans le milieu du travail et s’opposer aux politiques de l’extrême droite.
  • De nombreuses actions sont prévues partout en France, notamment des assemblées générales, des rassemblements antifascistes, et des initiatives de jeunesse.
  • Diverses associations, dont des groupes environnementaux et féministes, se joignent à l’appel à la mobilisation pour empêcher les gains électoraux de l’extrême droite et promouvoir un agenda progressiste. Le site Agir pour les législatives 2024 (https://agir-legislatives2024.org/) recense et partage les manifestations, événements, communiqués et ressources documentaires pour convaincre autour de soi.

Un nouveau front populaire malgré les divergences entre la droite du PS et LFI. Au terme de quatre jours de tractation, l’ensemble des partis de gauche se sont réunis au sein du Nouveau Front populaire, dont le programme a été présenté vendredi 14 juin. Cette alliance, qui pose problème au camp présidentiel et à l’ensemble de sa droite, a réussi, non sans mal, à convaincre la droite du Parti socialiste (hollandistes et le Printemps républicain) et Place publique, le micro parti de Raphaël Glucksmann. L’aile conservatrice de la gauche a d’abord rejeté toute alliance comme l’illustre cette déclaration de Bernard Cazeneuve, insinuant que LFI est un parti trop radical pour gouverner: « Le rassemblement de la gauche de gouvernement ne peut pas se faire avec LFI. Sauf à tout trahir de l’héritage de Blum ». Une référence à Blum qui s’inscrit dans la campagne d’accusations en antisémitisme envers la France insoumise. Dans une tribune, Antoine Malamoud l’arrière petit-fils de l’ancien chef de file de la SFIO (l’ancêtre du PS) recadre l’ancien Premier ministre en lui rappelant que « Léon Blum n’était pas un “révolutionnaire”, mais bien un réformiste radical, qui luttait pour des transformations fondamentales de la société capitaliste. » Et de conclure : « C’est au cœur de la pensée de l’extrême droite que l’antisémitisme est structurellement présent, quel qu’en soit son camouflage, il est le support de toute l’orientation de la préférence nationale, il est au cœur de l’idéologie identitaire. » Finalement, face à la gravité de la situation, François Hollande a validé l’accord, entraînant avec lui les réticents.

Antoine Malamoud, Bernard Cazeneuve accapare Léon Blum, Le Club de Médiapart, 11 juin 2024

Karine Lepointeur, Législatives 2024. Bernard Cazeneuve refuse le rassemblement de la gauche avec LFI, France 3 Normandie, 11 juin 2026

Le programme traduit des compromis de l’ensemble des partis politiques, dont la partie consacrée à Gaza, qui a cristallisé de nombreuses dissensions depuis le 7 octobre, permet de mesurer les efforts pour que toutes les positions puissent s’y retrouver. C’est un programme qui se veut en « rupture avec la politique d’Emmanuel Macron répondant aux urgences sociales, écologiques, démocratiques et pour la paix. » En cas de succès aux élections législatives, le gouvernement de gauche mettra en œuvre plusieurs mesures phares : le Smic sera porté à 1 600 euros nets, les réformes des retraites et de l’assurance chômage seront annulées, et la loi sur l’immigration sera abrogée. Le programme sera financé par une fiscalité plus juste mise au profit d’une meilleure redistribution. 

Si l’extrême-droite accède au pouvoir

Le programme du RN est dangereux

Un programme discriminatoire. Cécile Alduy, sémiologue, propose la synthèse du programme du RN sur son compte X, et en rappelle qu’il se fonde essentiellement sur la discrimination.

Rappel : le programme immigration du RN. Depuis 2021, Marine Le Pen essaie d’imposer un projet de loi sur l’immigration xénophobe qui rompt avec le principe d’égalité, viole les conventions européennes, les principes de justice, et la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789. Intitulé « Citoyenneté, identité, immigration », ce texte vise à bloquer l’arrivée des immigrés, mais cible aussi les familles en situation régulière, les réduisant à des « sous-citoyens ». La « préférence nationale » inclut des discriminations dans l’emploi et le logement social. Marine Le Pen prévoit d’adopter ce projet par référendum pour contourner le Parlement, une démarche que le constitutionnaliste Dominique Rousseau qualifie de « coup d’État contre l’État de droit ». Le projet vise également à interdire aux binationaux l’accès à des emplois publics et dans des entreprises chargées de missions de service public, rappelant des mesures historiques d’exclusion. Si elle venait un jour à être adoptée, cette loi constituerait un séisme économique et humain, interdisant potentiellement des millions d’emplois aux étrangers et binationaux.

« La lutte contre les violences envers les femmes n’est jamais portée par l’extrême droite ». Alors que la dissolution de l’Assemblée nationale a mis fin à la commission d’enquête sur les VSS dans le cinéma, Judith Godrèche estime que c’est un coup dur pour l’égalité des droits entre les hommes et les femmes. Mais, pour elle, « la réflexion est amorcée. Et elle ne s’arrêtera pas. » Interrogée par Mediapart sur la possibilité que le RN accède au pouvoir, elle est lucide : « Contre les violences, on sait bien qu’on ne peut pas compter sur l’extrême droite : en France comme en Italie ou ailleurs, elle menace directement les droits des femmes et des groupes minorisés. Lutter contre l’extrême droite, c’est donc aussi lutter contre les violences. Les victimes ne s’y trompent pas – et elles seront nombreuses à aller voter. Il n’est pas question de mettre en attente ou entre parenthèses ce combat. »

Contrairement à ce que l’on entend régulièrement dans le débat public, le programme du RN n’a rien de social. Cinq enseignants-chercheurs dont Mickaël Zemmour le démontrent et mettent en garde en analysant la protection sociale. La politique prônée par le RN vise, en effet, la déconstruction de la protection sociale et des services publics. Dans la lignée de la politique menée par Emmanuel Macron, le RN envisage le dé-financement des protections sociales en réduisant les recettes avec la baisse massive des cotisations des entreprises, l’introduction de niches fiscales pour les plus riches et la baisse de la TVA. Ces mesures mettraient les budgets de la protection sociale et des services publics sous pression, justifiant de nouvelles mesures d’austérité. L’autre grande direction de ce programme vise l’exclusion des étrangers de leurs droits sociaux. Ces mesures incluent la suppression de l’aide médicale d’État et l’exclusion des familles étrangères des allocations familiales et des aides au logement. Le programme va à l’encontre des principes d’égalité de traitement et de droits sociaux universels propres à notre système de protection sociale.

Tribune collective, Au programme du RN : xénophobie et affaiblissement des protections collectives, Le Club de Médiapart, 12 juin 2024

Pour le RN, pas d’urgence pour l’abrogation de la réforme des retraites. Quant aux retraites, Jordan Bardella a d’ailleurs adouci la position de son parti sur les retraites, déclarant le 11 juin sur France 2 que revenir sur la réforme d’Emmanuel Macron, qui repousse l’âge de départ à 64 ans, n’interviendrait que dans un « second temps » en cas de victoire. Initialement opposé à cette réforme, le RN a souvent varié sur les retraites. Bardella privilégie désormais un renforcement du départ anticipé pour les « carrières longues ». Selon Renaud Labaye, secrétaire général du groupe RN à l’Assemblée, la réforme des retraites ne figurera pas dans le programme législatif du RN, axé sur l’immigration, l’insécurité et le pouvoir d’achat.

La présomption de légitime défense portée par le RN : un danger. Le Rassemblement national persiste dans sa campagne en mettant en avant deux thèmes récurrents : la lutte contre l’immigration et la sécurité. Une mesure phare est la présomption de légitime défense pour les policiers, inscrite dans le programme depuis plusieurs années. Cette disposition viserait à restreindre les poursuites contre les forces de l’ordre en les considérant immédiatement en état de légitime défense. Cette approche suscite des inquiétudes quant à une augmentation des violences policières légitimées et à une justice entravée. Historiquement, cette proposition est soutenue par des associations d’extrême droite et a pour but de consolider l’électorat RN parmi les forces de l’ordre (lors de l’élection présidentielle en 2022, plus de 51 % des policiers et des militaires ont voté pour Marine Le Pen, contre 30 % en 2012). Cependant, elle pourrait mener à des conséquences graves pour les libertés publiques et exacerber les tensions sociales. L’adoption de telles politiques représenterait un recul pour la justice et les droits des citoyens, posant même la menace de la formation de milices et de groupes paramilitaires sous l’égide d’un gouvernement RN.

L’extrême-droite n’aime pas la culture mais s’en servira pour son projet identitaire. Le Quotidien de l’art fait un tour d’horizon des pays européens pour évaluer l’impact croissant de l’extrême droite sur la culture. Les partis d’extrême droite, comme en Italie avec Giorgia Meloni, en Hongrie sous Viktor Orbán, et en Pologne avec Droit et Justice, ont mis en œuvre des politiques culturelles restrictives. Ces mesures incluent la censure, la réduction des budgets culturels, et la promotion d’un récit nationaliste étroit. En Italie, par exemple, on assiste à une transformation culturelle radicale. Dès son accession au pouvoir, Meloni a lancé un décret anti-rave party, symbolisant sa volonté affirmée de mettre fin à l’influence culturelle de gauche. Dans les institutions culturelles, les directeurs étrangers ont été remplacés par des Italiens. Des personnalités proches de Meloni ont été placées à des postes clés comme le MAXXI (musée d’art contemporain) à Rome et la biennale de Venise, provoquant des critiques et des tensions au sein du secteur culturel. La Rai, service audiovisuel public, est également sous pression avec des accusations de contrôle de l’information et de censure envers les critiques de Meloni. En parallèle, le secteur cinématographique italien attend une décision sur ses financements, avec une réduction importante des crédits d’impôts prévue cette année. Malgré cela, un fonds spécial de 52 millions d’euros a été créé pour soutenir des productions célébrant l’identité nationale italienne, selon le ministre de la Culture Gennaro Sangiuliano. Dans d’autres pays européens, l’extrême droite influence également le débat culturel, même sans être au pouvoir, en contestant les valeurs cosmopolites et libérales qui façonnent la vie culturelle.

Magali Lesauvage, Alison Moss, Marine Vazzoler, Jordane de Faÿ, Quentin Raverdy, Culture : quand l’extrême-droite est au pouvoir, Le Quotidien de l’art, 6 juin 2024

Quel équilibre des pouvoirs en cas de cohabitation ? En cas de cohabitation avec une majorité d’extrême droite menée par le Rassemblement national, la Constitution de la Ve République limiterait fortement les pouvoirs du président. Il deviendrait principalement un arbitre et un symbole de l’État, perdant son rôle exécutif direct sur la politique nationale. Ses pouvoirs se résumeraient à la possibilité de dissoudre l’Assemblée nationale une fois par an et de convoquer des référendums pour contester les lois adoptées par la majorité parlementaire. Bien qu’il conserve un rôle dans certaines nominations clés, comme celles des préfets et des ambassadeurs, ces décisions nécessiteraient le contreseing du Premier ministre. Le Conseil constitutionnel jouerait un rôle crucial en tant que gardien des principes constitutionnels, ayant le pouvoir de censurer les lois jugées non conformes. Le président pourrait nommer certains membres du Conseil constitutionnel, mais cette influence reste limitée, nécessitant l’accord d’autres autorités. En résumé, la cohabitation ne bloquerait pas la mise en œuvre de la politique du RN mais modérerait ses excès potentiels en forçant des compromis et en respectant les contraintes constitutionnelles. Cependant, cela dépendrait de la volonté de l’extrême droite de respecter les normes institutionnelles en place, ce qui pourrait conduire à des tensions et des crises institutionnelles.

L’inquiétude dans les territoires populaires

Dans la communauté musulmane, l’inquiétude de l’accession au pouvoir du Rassemblement national est grande. Les musulmans redoutent un gouvernement d’extrême droite, craignant des restrictions sur le port du voile, déjà évoquées par Bardella et Marine Le Pen. Les politiques proposées par le RN incluent également des limitations sur la construction de mosquées et l’interdiction de l’abattage rituel des animaux. C’est une perspective de discriminations encore plus forte qu’elle ne l’est déjà. « Macron joue depuis sept ans une politique d’extrême droite avec des mesures discriminatoires et des outils de sécurité extrêmement puissants destinés aux musulmans [tels que la loi consolidant les principes de la République de 2021]. […] Dans les mains de l’extrême droite, ce sera une catastrophe », s’inquiète la responsable de l’ONG Action Droits des Musulmans, Sihem Zine. Pour les musulmans français, les élections législatives anticipées sont un moment critique pour contrer les politiques discriminatoires de l’extrême droite et pour faire valoir leurs droits.

Samia Lokmane, France elections: Muslims fear ‘a disaster’ if the far right wins, Middle East Eye, 14 juin 2024

Des élus inquiets. Dans les quartiers populaires, la perspective des élections anticipées a provoqué un choc parmi les élus. Le maire d’Evry-Courcouronnes (Essonne), Stéphane Beaudet, décrit l’annonce de la dissolution comme un acte risqué. Bruno Piriou (divers gauche), maire de Corbeil-Essonnes, souligne les divisions profondes de sa commune. La ville a voté à 34% pour LFI et à 24% pour le RN. Gilles Leproust (PCF), maire d’Allonnes (Sarthes) et président de l’association Ville et Banlieue, qualifie l’annonce de dissolution d’« uppercut » à propos du choc de l’annonce. « Pendant la campagne, j’ai beaucoup entendu : “On les a pas essayés”, à propos de l’extrême droite », observe-t-il alors que le RN a obtenu 37% des suffrages dans sa commune, loin devant LFI (14%). Philippe Rio (PCF), maire de Grigny, craint les conséquences d’une victoire du RN pour les ressources de la ville : « Les quartiers n’étaient déjà pas la priorité. Mais, si l’extrême droite gagne, ils vont nous matraquer fiscalement, financièrement. » À propos des habitants de Grigny devant les résultats dimanche soir, il décrit: « J’ai vu de la peur, ce soir. La préférence nationale appliquée à nos territoires, cela voudra dire quoi ? » Ali Rabeh (Générations), maire de Trappes, exprime sa colère contre l’incertitude politique et ses impacts potentiels sur les services publics locaux. « Demain, qu’est-ce qui se passera si j’ai un sous-préfet, un préfet, un ministre de l’intérieur, un premier ministre d’extrême droite ? », interroge-t-il.

Pendant ce temps, sous la gouvernance macroniste

Gabriel Attal a confirmé que le décret pour la réforme de l’assurance chômage sera pris d’ici au 1er juillet, malgré l’échec des négociations avec les partenaires sociaux.

Bien que l’Assurance chômage prévoit des recettes excédentaires par rapport aux dépenses en 2024, la diminution de sa dette, largement due à la période COVID-19, sera entravée par les prélèvements de l’État. L’Unedic souligne que cette situation nécessitera d’emprunter à nouveau sur les marchés financiers, malgré des taux élevés.

La mission d’information sénatoriale sur la dégradation des finances publiques a rendu public son rapport ce 13 juin. Le rapport critique sévèrement le gouvernement pour son imprudence et sa rétention d’informations lors de l’élaboration du budget, dénonçant des prévisions de recettes irréalistes et une gestion budgétaire lacunaire. Il recommande plus de transparence et propose des réformes pour renforcer le contrôle parlementaire et améliorer la fiabilité des projections financières.

Alors que la dissolution de l’assemblée nationale a mis fin aux travaux de la commission sur l’aide sociale à l’enfance (ASE), une fillette de 4 ans a été retrouvée morte dans un foyer départemental de l’enfance.

Benjamin Derveaux, Marine Legrand et Nicolas Goinard, Val-de-Marne : une fillette de 4 ans retrouvée morte au foyer départemental de l’enfance, Le Parisien, 9 juin 2024 

Une enquête de France 2 révèle des témoignages poignants de policiers victimes de racisme au sein de leur propre institution. Des cas de discrimination, y compris des incidents de langage raciste, sont dénoncés, mais peu font l’objet de signalements formels, par crainte de représailles. La hiérarchie est accusée de minimiser le problème, malgré les dispositifs existants pour signaler de tels comportements.

Isabelle Beauséjour et Laurent Desbois, Révélations sur les dérives racistes au sein de la police, Journal de 20h (L’Oeil du 20h), France 2, 12 juin 2024

Dans un contexte où l’antitsiganisme augmente dans la société, l’association Da So Vas lutte contre les discriminations sur les aires d’accueil des « gens du voyage » à Lille. Elles dénoncent la pollution grave causée par leur environnement industriel, affectant la santé des résidents. Face aux expulsions arbitraires et aux restrictions discriminatoires, elles ont lancé une pétition et proposé une charte pour défendre leurs droits fondamentaux. 

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